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Question de M. Gilbert-Luc Devinaz (Rhône - SER) publiée le 29/02/2024

M. Gilbert-Luc Devinaz appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires concernant les coupes rases en forêt qui font l'objet de controverses particulièrement fortes ces dernières semaines.
Des associations alertent sur la multiplication et l'impact de ces coupes, plusieurs médias ont traité le sujet à des heures de grande audience, et des riverains sont allés jusqu'à bloquer des chantiers de coupes rases.
Ces demandes d'encadrement des coupes rases font suite à la publication de l'expertise CRREF (coupes rases et renouvellement des peuplements forestiers), commandée par son ministère et par le ministère de l'agriculture. Cette expertise souligne notamment les effets néfastes des coupes rases pour les sols et le micro-climat forestier. Elle indique également que plus les coupes rases sont grandes, plus l'impact sur la biodiversité est élevé.
Étant donné que le puits de carbone en forêt française a été divisé par 2 au cours des 10 dernières années, alors que la France s'est engagée à maintenir ou augmenter le puits de carbone en forêt dans l'article 5 des Accords de Paris, et que 27 % des espèces forestières françaises sont menacées ou quasi-menacées selon l'institut national de l'information géographique et forestière (IGN), il apparaît en effet prioritaire d'encadrer les coupes rases et de mettre en avant la sylviculture mélangée à couvert continu, qui permet de récolter du bois de qualité en alliant les enjeux économique et environnementaux.
Deux propositions de loi récemment déposées à l'Assemblée nationale par des députés de 8 partis proposent des mesures en ce sens. La première est transpartisane et soutenue par des députés du MoDem, de Horizons, de La France insoumise, du parti socialiste, de Libertés et territoires et d'Europe Écologie Les Verts. La seconde va dans le même sens et est soutenue par les partis de la majorité.
Il lui demande s'il soutient ces propositions.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 20/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 1123, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le ministre, les coupes rases en forêt font l'objet de controverses particulièrement fortes ces dernières semaines.

Des associations alertent sur leur multiplication et leur impact. Plusieurs médias ont traité le sujet à des heures de grande audience et des riverains sont allés jusqu'à bloquer des chantiers.

Les demandes d'encadrement font suite à la publication de l'expertise CRREF - coupes rases et renouvellement des peuplements forestiers -, commandée par le ministère auquel vous êtes rattaché et par le ministère de l'agriculture. Cette expertise souligne notamment les effets néfastes de ces pratiques pour les sols et le microclimat forestier. Elle indique également que plus les coupes rases sont grandes, plus l'impact sur la biodiversité est élevé.

Étant donné que le puits de carbone en forêt française a été divisé par deux au cours des dix dernières années et que 27 % des espèces forestières françaises sont menacées ou quasi menacées selon l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), il apparaît en effet prioritaire d'encadrer les coupes rases et de mettre en avant la sylviculture mélangée à couvert continu.

Cette pratique permet de récolter du bois de qualité en alliant les enjeux économiques et environnementaux.

Deux propositions de loi récemment déposées à l'Assemblée nationale envisagent des mesures en ce sens. Le Président de la République a annoncé vouloir planter un milliard d'arbres d'ici à 2032 pour faire face au changement climatique.

Au-delà de l'effet de communication, c'est une véritable politique d'adaptation des forêts qui doit être bâtie avec tous les acteurs.

Monsieur le ministre, le règlement européen sur la restauration de la nature a été adopté le 27 février dernier. Comment comptez-vous appliquer ce règlement, notamment en matière de restauration des écosystèmes forestiers ? Soutenez-vous les textes déposés dernièrement pour encadrer les coupes rases ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Gilbert-Luc Devinaz, je tiens d'abord à rappeler la qualité de la gestion des forêts françaises, contrairement à la vision caricaturale qui est parfois véhiculée. Le débat se focalise trop souvent, à mon sens, sur les coupes rases.

La surface de forêt hexagonale a doublé depuis le milieu du XIXe siècle, et le volume de bois sur pied a augmenté de plus de 50 % depuis les années 1980. Les indicateurs de bois mort et de diversité des essences recensés par l'IGN progressent depuis vingt ans, signe d'une biodiversité mieux préservée en forêt que dans d'autres milieux.

Cependant, un réchauffement de 2,5 à 3,5 degrés Celsius à l'horizon 2050 aura des effets majeurs sur les forêts françaises.

Trois priorités fondent notre stratégie d'adaptation forestière : d'abord, accompagner nos forêts vers de nouveaux profils sylvicoles, avec des bouquets d'essences diversifiées et adaptées au climat sec et chaud ; ensuite, valoriser en usage matériaux les bois actuellement présents dans nos forêts avant que leur qualité technologique ne se dégrade au point de les condamner à un usage bois énergie ; enfin, étendre et amplifier la prévention des incendies.

Ces priorités figurent en bonne place parmi les objectifs du prochain plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), qui sera soumis à la consultation du public par le ministre Christophe Béchu dans les prochaines semaines.

La transition forestière nécessitera agilité et innovation. Elle passera par une diversité de solutions et de modes de sylviculture adaptés au profil des peuplements forestiers, ainsi qu'au contexte de chaque massif, loin des idéologies, des carcans et d'un modèle unique dans lesquels certains souhaiteraient enfermer les propriétaires forestiers.

La transition forestière oblige à être encore plus attentif aux enjeux de la protection du capital naturel que constituent les sols forestiers et la biodiversité et à renforcer le mélange des essences de reboisement.

Les propositions de loi que vous avez évoquées contiennent effectivement des mesures qui vont en ce sens. Il reviendra au Parlement de se prononcer à leur sujet.

La transition forestière appelle surtout à l'action, à une mobilisation collective et positive aux côtés de ceux qui sont en première ligne face au défi du changement climatique. Je pense aux propriétaires, aux gestionnaires, aux exploitants et aux industriels du secteur forestier. Le Gouvernement est à leurs côtés, en consacrant des moyens inédits au secteur forestier dans le cadre de la planification écologique.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais ma question portait sur la façon dont vous envisagiez d'appliquer le règlement européen adopté le 27 février dernier.

Les conséquences sur la biodiversité seront l'indicateur qui nous permettra de mesurer les évolutions dans le temps, au-delà des effets d'annonce, qui ne peuvent pas compenser l'action.

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